Une épuisante normalité assortie d'une double peine de culpabilisation.

Il y a quelques jours, Jack Parker, ancienne rédactrice en chef du site Madmoizelle.com (site par ailleurs génialissime mais dont je vous parlerai plus en détail une autre fois), a été victime d'une agression sexuelle. Une épuisante banalité dans notre société, qui continue de pourir la vie de nombreuses femmes. Cette jeune femme a décidé qu'elle ne se laisserai pas faire : elle a rendu avec ses poings ce que son agresseur lui avait fait subir avec sa bêtise. Puis elle a raconté son histoire sur son blog. Au fait, petit détail qui a son importance : Jack Parker portait une jupe au moment de son agression. Anodin me direz-vous ? Pas tant que ça : les réactions haineuses n'ont pas cessé de pleuvoir à la suite de son témoignage. Elle est accusée de « l'avoir bien cherché » ; d'avoir « voulu être agresser »...

Un petit florilège de ces commentaires :

Ça va ? Pas encore en train de vomir ? Si ce n'est pas le cas voilà qui devrait être encore plus efficace :

On pourrait croire que ces réactions sont l’œuvre de personnes ignorantes ou stupides. Il n'en est rien. Les mots sont sciemment choisis pour appuyer juste là ou ça fait mal, car après tout, quoi de pire que de voire son agression, sa peine, minimisée ? Quoi de pire que d'apprendre par d'autres qu'en fait, on est coupable ?

Combien de fois faudra-t-il le répéter ? JAMAIS UNE VICTIME N'EST COUPABLE DE QUOI QUE CE SOIT.

La jupe n'est en rien une invitation au tripotage.

La jupe est l'excuse invoquée par les agresseur et leurs partisans pour expliquer leur geste.

Combien de fois faudra-t-il répéter, que ce n'est pas aux femmes de faire attention à leur façon de s'habiller mais aux hommes de faire attention à leur comportement ?

Vous en voyez beaucoup, vous, de femmes qui mettent une mains aux fesses d'un homme qui se balade en short ?

Non.

Notre société patriarcale condamne les femmes à subir l'indécence d'une partie des hommes. Elles les condamne à devoir rester les victimes impuissantes de ce qu'elle subisse. Et quand l'une d'elle veut se rebeller ? Quand l'une d'elle montre que malgré tout, elle ne cédera pas à la facilité de considérer cela comme quelque chose de normal, quelque chose sont il faut se protéger mais qu'on ne peut de toute manière pas empêcher ? Elle est alors considérée comme en partie ou en totalité coupable de son agression. D'ailleurs, peut importe la manière dont cela s'est passé, le type d'habits ou de maquillage qu'elle arborait car les manœuvres de culpabilisation visent tous le monde. Elle portait une jupe ? Elle l'a cherché, il ne faut pas exhiber ses jambes comme ça ! Elle rentrait chez elle tard le soir ? Elle l'a cherché, il ne faut pas rester seule dans la rue à une heure pareille ! Elle faisait son footing seule dans la forêt ? Elle l'a cherché, il ne faut pas être seule dans ces situation !

Notre société en général, trouvera toujours un moyen de faire culpabiliser les victimes.

Selon ces commentaires, il faudrait donc arrêter d'être belle, séduisante, d'arrêter de porter des vêtements légers quand la météo s'y prête, de ne surtout pas avoir le moindre aspect de notre corps qui pourrait s'interpréter comme un appel à l'agression. Le problème, c'est que beaucoup (trop) de femmes ont déjà expérimenté des mains baladeuses, des commentaires désobligeants ou une agression alors qu'elle n'avait une tenue absolument pas courte, ou qui dévoilait leur corps... Serait-ce impossible d'éviter cela ?

La vérité, c'est que si l'on résonne comme ça, évidemment ces situations ne cesseront jamais. Et si, pour une fois, on faisait culpabiliser les agresseurs plutôt ? Je ne sais pas si cela aurait un quelconque impact sur le nombre d'agression, mais mon Dieu quel impact sur la manière dont est envisagée la place des femmes !

Cette incessante culture du viol est encore trop présente dans notre société actuelle. Une preuve ? Aucune campagne sur les femmes battues/violées ne s'adressaient... à leur mari/violeur ! Non, à chaque fois, ce sont les femmes qui sont visées. Je sais pertinemment que le but n'est pas de faire culpabiliser ces femmes, mais inconsciemment cela créé cet effet. Car, si l'on s'adresse à elle de cette manière, on leur fait passer le message : « c'est à toi de faire changer la situation ». Or dans l'inconscient collectif, c'est à celui qui a provoqué la situation de la faire changer !

Pour moi, la seule et unique solution pour sortir de ces normalité infernale, c'est d'inverser notre façon de penser : arrêter de conseiller à nos filles/petites sœurs de faire attention à leurs habits, à leur apparence ; mais éduquer nos fils/petits frères à toujours respecter une femme, quelque soit la situation. De ne jamais considérer que si elle porte des vêtements courts ou moulants c'est qu'elle a envie de se faire draguer ou toucher.

Heureusement, tous le monde ne réagit pas comme cela, et je tiens à terminer cet article sur une note positive, car la mobilisation de la communauté sur internet m'a absolument bluffé ! En une journée, l'histoire de Jack Parker à été partagée de multiples fois sur les réseaux sociaux et les sites internet des plus grands journaux ont relayé l'affaire ! Les réactions enflammées ont plu de toute part, de la part d'hommes et de femmes. La plupart était outrées.

Il faut changer notre logique de pensée face aux agressions sexuelle, mais personne n'a le droit de dire que rien ne changera jamais, car la mobilisation est là, partout, et elle ne perd jamais une occasion de se manifester. On peut faire changer les choses, mais il faut commencer par notre pensée. Arrêter le slut shaming, arrêter la culpabilisation des victimes, arrêter de conseiller d'oublier et de passer à autre chose. Les choses changeront, j'en suis convaincue, mais pas sans vous tous !

Petit lien vers l'article de Madmoizelle.com :

http://www.madmoizelle.com/colere-harcelement-agression-sexuelle-239358

C'est quoi le slut shaming ? La réponse ici !

http://www.madmoizelle.com/slut-shaming-115244

Harcèlement de rue : Les victimes toujours fautives

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